Notre voix, nous l'utilisons tous les jours sans nous en rendre compte. C'est le moyen de communication le plus instinctif à notre disposition. Mais nous oublions trop souvent l'instrument qui sert à produire ces sons : notre corps !
Vous trouverez ici différents petits exercices, inspirés du monde du théâtre, du chant, du sport ou de la relaxation pour travailler ou prendre conscience des différents éléments qui peuvent aider à "porter" sa voix :
la posture du corps, pour que l'instrument puisse se préparer à jouer,
la respiration, pour faire circuler l'air dans l'appareil phonique,
la phonation, l'articulation et la résonance, qui permettent d'utiliser le souffle pour produire une vibration et donc, un son !
Ces éléments ne se veulent pas exhaustifs et ont pour but de proposer des activités utilisables en classe, auprès d'élèves. Ils n'ont pas de valeur médicale ou professionnelle.
Certains exercices peuvent être répétés de façon régulière, pour ritualiser la prise de parole, d'autres sont uniquement destinés à une prise de conscience, pour un usage unique. Chaque exercice est accompagné d'une discussion, pour apporter explications et prise de conscience aux élèves.
Libre à l'enseignant de les adapter à ses besoins et au contexte.
Posture⚓
Prendre conscience de l'ancrage
Exercice : Debout, écraser avec le bout du pied un petit objet fictif (type chewing-gum, mégot, miette de pain...), en y mettant un maximum d'énergie et de volonté. Ne pas hésiter à effectuer des rotations avec la cheville, le genou, la hanche, s'arc-bouter (dans la limite du raisonnable !). On peut demander aux élèves de prononcer une phrase en même temps.
Discussion : Une fois l'exercice terminé, demander aux élèves :
s'ils ont les mêmes sensations dans la jambe qui a servi à écraser et dans l'autre (sensation de lourdeur),
s'ils sentent qu'il est plus facile de parler maintenant ou pendant l'exercice (nécessité de positionner son corps correctement et d'être détendu pour prendre facilement la parole).
Il est recommandé de refaire l'exercice avec l'autre jambe après la discussion, pour prendre conscience des éléments indiqués et pour équilibrer les sensations dans les deux jambes.
Source : Le Petit Livre de la voix, de Catherine Pierre Griotto
Échauffer son corps
Exercice : Comme dans de nombreuses pratiques sportives, l'échauffement se réalise debout, du haut vers le bas du corps, sans forcer. Chaque exercice est à répéter environ 3 fois.
la tête : faire rouler la tête sur le torse, d'une épaule à l'autre, puis revenir. Faire ensuite rouler la tête vers le dos, en allant d'une épaule à l'autre. (Variante ou complément : faire "non" de la tête, avec un mouvement ample de droite à gauche, puis faire "oui", avec un mouvement ample de haut en bas).
les épaules : faire rouler les épaules, les bras le long du corps, dans un sens, puis dans l'autre. Puis, en mettant les mains sous les aisselles, refaire l'exercice. Les coudes doivent alors réaliser des cercles (un peu comme un oiseau qui bat des ailes).
le thorax : déplacer le buste de droite à gauche, sans bouger le bassin (on peut tenir son bassin avec les mains), et en gardant l'axe des épaules droit et horizontal.
le bassin : sans bouger le thorax, faire des cercles avec le bassin (un peu comme une danse du ventre...).
Discussion : Pas de discussion importante sur cette partie. Les élèves ont en général l'habitude des échauffements sportifs, au besoin on peut leur demander s'il se sentent "différents" et les interroger sur leurs sensations.
Être à l'aise, assis
Exercice 1 : s'asseoir au bord de la chaise, poser ses pieds sur le sol (jambes non croisées), les genoux à 90°. Regarder droit devant soi, garder le dos droit, relâcher ses épaules. Positionner ses bras sur la table ou sur ses genoux, non croisés. Prendre quelques inspirations.
Discussion : Faire prendre conscience aux élèves en les interrogeant sur leurs sensations que leur position est très stable, mais que tout le haut de leur corps est libre : ils peuvent tourner la tête dans tous les sens, bouger les épaules (on peut refaire les moulinets), bouger le buste (sur les côtés, et d'avant en arrière). La plupart de leurs muscles sont détendus.

Exercice 2 : Pour faire comprendre l'importance de la posture aux élèves, leur demander de rechercher une posture inverse : jambes croisées, bras croisés sur la poitrine, tête baissée, dos arrondi, muscles contractés.
Discussion : Leur demander alors leurs sensations et les amener à remarquer que leur voix est bien plus difficile à comprendre.
Il est recommandé de reprendre un petit temps pour se détendre à nouveau, en reprenant la posture de l'exercice 1 et en "s'agitant" un petit peu : bouger les bras, le buste, la tête pour évacuer les tensions.
Source : Le Petit Livre de la voix, de Catherine Pierre Griotto
Respiration⚓
Prendre conscience du mécanisme de la respiration
Les poumons et la cage thoracique
Discussion : Les poumons ne sont pas des muscles : pour les gonfler et les dégonfler, il faut les muscles de la cage thoracique et le diaphragme.
Notre respiration est en fait constituée de 2 mouvements : l'inspiration et l'expiration. Bien savoir jongler entre les deux, c'est savoir gérer son souffle, pour pouvoir poser sa voix, car on ne parle, le plus souvent, que sur l'expiration. Mais ce n'est pas la quantité d'air inspirée ou expirée qui fait varier la puissance de la voix. On peut s'en convaincre avec l'exercice ci-dessous.

Exercice : Essayer de lire un texte (choisi en lien avec l'activité qui suivra, d'une dizaine de lignes environ) jusqu'au bout, sans reprendre son souffle.
Discussion : Faire remarquer aux élèves que le niveau sonore des lectures est resté le même pratiquement jusqu'à la fin : il n'y a pas besoin de prendre une grande inspiration pour bien parler !

Le diaphragme et les muscles abdominaux
Discussion : Le diaphragme est un muscle qui sépare l'abdomen et la cage thoracique. Il remonte quand nous expirons (pour chasser l'air des poumons) et redescend quand nous inspirons. Son mouvement est donc en partie lié aux muscles abdominaux, car en s'abaissant et se relevant, il appuie sur l'estomac (c'est pour cela que l'on a parfois la respiration "lourde" après un bon repas !).
Il est donc logique que lors d'une inspiration, le ventre "se gonfle", puisque le diaphragme vient pousser vers l'estomac. Ce mouvement est signe d'une "bonne respiration", mais il est parfois inversé...

Exercice 1 : En position assise (vue dans la partie "Posture", plus haut), respirer (inspirer et expirer) doucement. Puis, sur la fin d'une expiration prononcer "Hhhha, hhhhe, hhhhi, hhhho, hhhhu", en accentuant bien le "hhhh".
Discussion : En faisant discuter les élèves autour de leurs sensations, faire remarquer qu'ils ont dû ressentir une vibration ou une forte contraction en bas du thorax. Ce n'est pas leur diaphragme (on ne peut pas le ressentir), mais cette sensation permet de le situer.

Exercice 2 : Toujours en position assise, poser une main sur son thorax, une main sur son ventre. Respirer calmement, sans bouger les épaules, et sentir que :
lors de l'inspiration, la cage thoracique et le ventre se gonflent,
lors de l'expiration, les deux s'affaissent.
Il faut parfois un petit moment pour coordonner les deux mouvements, car certains élèves peuvent avoir tendance à rentrer le ventre lors de l'inspiration, réflexe acquis pour jouer sur sa silhouette... On peut aider les élèves à synchroniser ces mouvements en leur demandant d'imaginer que sur l'expiration, ils reçoivent un coup de poing dans le ventre. On fait jouer cette situation une ou deux fois de façon exagérée (abdomen rentré, épaules projetées vers l'avant, mains qui se dirigent vers le ventre...) avant de reprendre une respiration normale.
Discussion : Proposer aux élèves de partager leurs sensations, s'ils le veulent. Leur faire remarquer qu'il n'y a pas de bonne prise d'air sans ventre qui se gonfle lors de l'inspiration. Mais en aucun cas, l'air ne rentre dans le ventre : on ne respire pas par le ventre ! On peut aussi leur faire remarquer que sans bonne posture, il est impossible de bien gonfler ses poumons et le diaphragme ne peut pas bouger correctement.
Source : Le Petit Livre de la voix, de Catherine Pierre Griotto
Gérer son souffle pour se calmer
Discussion : La respiration prend une grande importance aussi dans la gestion des émotions. Par exemple, ne dit-on pas que l'on a besoin de souffler lorsque l'on veut se détendre ? On soupire lorsque l'on veut évacuer un stress.
A l'inverse, on va prendre une grande inspiration avant de commencer une tâche difficile, pour se donner du courage !
Il faut donc trouver un juste milieu entre les deux (inspiration et expiration) pour avoir une respiration fluide, sans blocage !

Exercice : A l'aide de la vidéo ci-contre, inspirer lorsque l'étoile gonfle, et expirer lorsqu'elle se contracte. Etre attentif aux mouvements de sa cage thoracique et de son ventre.
Discussion : Proposer aux élèves de partager leurs sensations, s'ils le veulent.

Cette technique est connue sous le nom de "Cohérence Cardiaque".
En modifiant l'équilibre des durées entre l'expiration et l'inspiration, on peut induire une relaxation ou une dynamisation. Attention cependant au phénomène d’hyperventilation !
Phonation, résonance et articulation⚓
Prendre conscience de la formation des sons
Le larynx et les cordes vocales
Discussion : Le larynx est l'endroit où la voix se forme. Il est situé après le pharynx, qui représente dans la gorge le croisement entre les voies respiratoires (poumons) et les voies digestives (œsophage). C'est donc dans le haut du larynx que se retrouvent quelques gouttent d'eau lorsque l'on "avale de travers" !
Nota : en temps normal, l'épiglotte est un clapet, en haut du larynx, qui se ferme lorsque l'on déglutit.
Le son commence à naître au niveau de deux rubans qui peuvent ouvrir ou fermer le larynx : les cordes vocales.

Exercice : Bouche grande ouverte, faire de petits "a, a, a, a" rapides. La sensation ressemble un peu à celle que l'on a en toussant, mais plus bas dans la gorge. On peut leur demander d'essayer de bloquer un "a" et de le faire sortir d'un seul coup.
Discussion : Demander leurs sensations aux élèves. Ils doivent repérer un "blocage" au fond de la gorge, qui saute dès que l'air arrive dans le haut de la gorge, puis dans la bouche. Cette sensation de conduite qui s'ouvre et se referme indique la position des cordes vocales. On voit alors que le son commence à naître à cet endroit. Cette exercice permet un premier échauffement des cordes vocales.
Cette sensation n'est pas particulièrement agréable pour la personne qui le produit : un son qui part de la gorge est plus désagréable qu'un son qui part du "ventre".

Les résonateurs
Discussion : Le son produit doit maintenant être amplifié. Il faut une caisse de résonance, comme celle d'un tambour, d'une guitare, d'un haut-parleur... Le son va donc être amplifié dans le larynx, puis le pharynx, la gorge, la bouche. La position de la langue, de la mâchoire, des lèvres, du palais, va modifier la taille de la caisse de résonance et donc faire varier le son.
L'espace nasal est aussi concerné, avec les sinus, mais il est plus difficile à travailler. Nous avons cependant tous conscience que nous n'avons pas la même voix lorsque nous sommes enrhumés !

Exercice 1 : Bouche ouverte, prononcer un "aaaaa" que l'on va faire durer tout au long de l'exercice,
d'abord en bougeant la langue, de haut en bas,
puis en avançant et reculant la mâchoire d'avant en arrière,
puis en refermant la bouche,
puis en rentrant la tête dans les épaules.
Discussion : Demander aux élèves leurs sensations et de commenter ce qu'ils ont entendu. Leur faire remarquer que le son a varié : en plus du changement d'intensité, on n'a pas toujours entendu un "beau a" !

Exercice 2 : Prononcer doucement les voyelles "a, e, i, o, u" :
une première fois, en faisant attention aux mouvements de la langue, des lèvres,
une seconde fois, en faisant attention à ce qui se passe à l'intérieur de la bouche (plus difficile).
Recommencer avec quelques consonnes ("n, m, p, t...").
Discussion : Demander aux élèves leurs sensations. Leur faire remarquer que les différents sons ne naissent pas au même endroit, d'où la nécessité pour un chroniqueur radio, un acteur, de s'échauffer le visage pour solliciter correctement tous les muscles concernés !
Prolongement : Prononcer une syllabe (ex : "pa") et faire observer aux élèves que le son voyage : le "p" se forme sur les lèvres alors que le "a" se forme bien plus en arrière.

La colonne d'air
Exercice : Respirer calmement, toujours assis comme vu dans la partie "Posture". Demander aux élèves de prononcer un "a" bref, en imaginant qu'il part de la gorge (comme dans l'exercice sur les cordes vocales). Puis recommencer en imaginant qu'il part du ventre.
Discussion : Demander leurs impressions. Le "a" basé sur la respiration abdominale a dû leur paraître plus puissant, mais aussi moins désagréable que le "a" coincé dans la gorge.
Source : Le Petit Livre de la voix, de Catherine Pierre Griotto
Échauffer sa tête et son visage
Exercice 1 : Placer le bout des doigts sur les côtés du cou, et masser légèrement en faisant de petits cercles. Se déplacer petit à petit vers l'avant du cou, tout en relevant doucement la tête.
Discussion : pas de discussion particulière. Cet exercice a pour but de réchauffer les muscles du cou pour libérer le larynx. On peut faire remarquer aux élèves qu'en cas de stress, on a la gorge serrée : il y a encore un lien entre émotion et voix.

Exercice 2 : En faisant de petits cercles, se masser les joues du bout des doigts, tout en ouvrant et fermant lentement la bouche.
Étirer ensuite la bouche horizontalement en un large sourire forcé et crispé. Faire un tour de classe en demandant à chacun de prononcer un mot (son prénom, son humeur...) en gardant ce sourire forcé. Chacun maintient cet étirement tout le long de l'exercice.
Recommencer un deuxième tour en étirant cette fois la bouche verticalement, en un grand O étonné.
Terminer par un nouveau petit massage des joues, agrémenté de grimaces en tous genres.
Discussion : Cet exercice, drôle mais peu agréable physiquement, permet de réveiller sa bouche et les muscles des joues.
Source : Le Petit Livre de la voix, de Catherine Pierre Griotto
Echauffer son appareil phonatoire
Exercice 1 : Souffler sur ses doigts, la bouche ouverte, comme si on souhaitait les réchauffer pendant l'hiver. Puis souffler doucement, comme à travers une paille. Pratiquer cet exercice entre 30 secondes et une minute.
Exercice 2 : Bouche fermé, faire "Mmmmm" en faisant partir le son le plus bas possible : ce n'est pas le nez qui doit vibrer, mais le fond de la gorge. Puis, sans forcer, faire monter et descendre le son, un peu à la façon d'une sirène de pompiers.
Exercice 3 : Bouche fermée, faire un bruit de moto "Brrrrrrr". Les lèvres vont vibrer, mais il est important aussi de sentir sa gorge vibrer. Puis faire accélérer la moto, en poussant le son.
Discussion : Ces exercices ont pour but de réchauffer le larynx et de réveiller les cordes vocales.
Remarque : Ils peuvent être pratiqués régulièrement pour "protéger sa voix" et sont utilisables en cas d'extinction de voix...

Projeter sa voix (facultatif)
Exercice : En groupe, prononcer une série de syllabes, tous ensemble après le chef de cœur. Le but n'est pas de crier, mais je faire porter sa voix au loin. On peut demander aux élèves d'imaginer qu'ils s'adressent à quelqu'un qui est à l'autre bout de la pièce, derrière un mur.
Si l'exercice est concluant, on peut demander aux élèves de prononcer une phase entière (prise dans la pièce ou dans les virelangues ci-dessous) avec le même objectif.
Remarque : ce travail n'est pas nécessaire pour une radio, mais plus dans le cas d'une pièce de théâtre ou d'une prise de parole devant un grand public.

Travailler sa diction
Exercice : Tous ensemble ou à tour de rôle, proposer de réciter les virelangues suivants :
Ce cher Serge cherche à changer son siège.
Je veux et j'exige d'exquises excuses.
Des blancs pains, des bancs peints, des bains pleins.
Tu t'entêtes à tout tenter, tu t'uses et tu te tues à tant t'entêter.
Ces six chauds chocolats-ci sont-ils aussi chauds quand ces six chocolats-là font leurs show ?
et bien sûr... les chaussettes de l'archi-duchesse !
Remarque : Il n'y a pas d'obligation de résultat à ces exercices !

Source : Le Petit Livre de la voix, de Catherine Pierre Griotto

Pour aller plus loin :
Je me lance : je vais parler en public, article de Frédéric Duriez
Le Petit Livre de la voix, de Cattherine Pierre Griotto
La technique vocale, tout simplement !, de Hervé Pata
Se préparer à l'oral par la pratique médiatique, CLEMI Académie de Bordeaux
Le grand livre de la technique vocale, de Hervé Pata
L'odyssée de la voix, de Jean Abitbol